Afrique de l’ouest : la Cellule Norbert Zongo engagée dans la promotion du journalisme d'investigation et de solutions

En journalisme, il y a un adage populaire qui dit : « le journaliste ne s’intéresse pas aux trains qui arrivent à l'heure ». Cet adage a traversé le temps. Il serait intégré dans la pensée journalistique dès les bancs de l’école, posé au frontispice de chaque rédaction puis rabâché au fil de la vie professionnelle du journaliste. Mais aujourd’hui, de plus en plus, certaines questions brûlent les lèvres : Pourquoi ne pas positiver l’actualité ? Pourquoi ne pas diffuser  l’information autrement pour donner envie d'agir ?

De nos jours, plusieurs organisations se consacrent au développement et à l’intégration du journalisme de solutions. Un tel engouement pour cette forme de journalisme cache de vives critiques sur l’utilité sociale du journaliste. Si l’on a pu montrer jusqu’à présent que le journalisme de solutions est loin d’être un épiphénomène, il polarise aujourd’hui de nombreuses tensions au sein de la profession.

Là où certains le voient comme "une nécessité pour réinventer l'avenir", d’autres s’interrogent sur sa pertinence. En tant que journaliste, devons-nous nous contenter seulement de dénoncer des faits ou de critiquer ? Et si on contribue à la recherche de solutions aux problèmes soulevés dans nos publications ? À la Cellule Norbert Zongo pour le journalisme d’investigation en Afrique de l’Ouest (CENOZO), au Burkina Faso, la question préoccupe. Déjà, la réflexion se mène sur comment le travail des journalistes d’investigation peut-il impacter positivement la gouvernance des États.

Cette réflexion trouve sa légitimité dans le constat amer que les enquêtes éditées par la CENOZO ces quatre dernières années n’ont provoqué peu ou prou de réactions dans les pays concernés. Les hommes d’affaires mis en cause sont toujours dans les bonnes grâces des pouvoirs politiques, les gouvernants impliqués dans des faits de corruption sont toujours en fonction, les violations des droits humains et les injustices dénoncées se perpétuent, tout ceci sous le regard impuissant des populations. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas promouvoir cette nouvelle méthode de diffusion de l’information.

Donner envie d’agir pour réinventer l’Afrique

« Impact du journalisme d’investigation sur la gouvernance en Afrique de l’Ouest ». C’est le thème retenu pour la prochaine Assemblée générale de la CENOZO. Mais avant que l’instance plénière n’aborde le sujet, ne serait-ce que de façon holistique, la CENOZO a commencé par expérimenter l’approche du journalisme de solutions à travers le projet « Autonomisation des femmes journalistes du Burkina Faso par le data journalisme ». Un projet pilote construit sur la trilogie : formation, production d’enquêtes et plaidoyer - organisation de tables rondes qui réunissent journalistes, acteurs de la société civile, représentants d’organismes internationaux et gouvernants pour discuter des problèmes soulevés par les enquêtes en vue d’explorer les pistes de solutions durables.

L’approche interroge la responsabilité citoyenne des journalistes d’investigation ainsi que la nécessité pour eux d’être plus en phase avec les attentes de la société. Elle caractérise une démarche soucieuse du journalisme de s’approprier les enjeux sociétaux. De manière sous-jacente, cette approche est le reflet d’un questionnement de longue date sur l’utilité sociale et la responsabilité des médias.

Aujourd’hui, le rôle des journalistes d’investigation et celui des médias en général dans l’atteinte des Objectifs de développement durable (ODD) ainsi que ceux de l’Agenda 2063 de l’Union africaine ne sont plus à démontrer. Face aux enjeux de l’émergence du journalisme de solutions, la CENOZO ambitionne d’implémenter son approche expérimentale à ses futurs projets. Mais ceci ne sera possible que grâce à l’accompagnement des partenaires techniques et financiers.