Afyasense : l’intelligence artificielle au service de la lutte contre le paludisme dans les zones rurales en Afrique
Heure de publication 14:00 - Temps de lecture : 2 min 37 s
Texte par : Thalf Sall
Le paludisme continue de frapper l’Afrique subsaharienne avec une violence silencieuse, tuant, affaiblissant et freinant le développement de millions de familles. Face à ce fléau, une jeune entrepreneure sénégalaise de 27 ans ose imaginer un futur où aucun enfant, aucune mère, aucun village ne serait encore laissé sans diagnostic. Son nom : Rokhaya Diagne. Son innovation : Afyasense, une technologie basée sur l’intelligence artificielle capable de détecter rapidement et avec précision les cas de paludisme, même dans les zones rurales les plus reculées.
Selon le dernier Rapport mondial sur le paludisme de l’OMS, l’Afrique subsaharienne reste de loin la région la plus touchée au monde : 94 % des cas mondiaux et 95 % des décès y sont enregistrés chaque année. Cette concentration dramatique n’est pas seulement liée à la présence du parasite et du moustique vecteur, mais aussi à un défi persistant : l’accès au diagnostic.
Dans de nombreux villages, diagnostiquer le paludisme demeure un véritable parcours du combattant. Les tests traditionnels exigent du personnel formé, des laboratoires équipés, des réactifs souvent coûteux et des délais qui ne correspondent pas à l’urgence de la maladie. Dans les zones rurales isolées, il faut parfois parcourir plusieurs kilomètres – parfois à pied – pour obtenir un simple test. Pendant ce temps, la maladie progresse, épuise l’organisme et peut devenir mortelle en quelques jours. Ce manque d’accès rapide, fiable et abordable au diagnostic est l’un des facteurs clés qui entretiennent le cercle vicieux du paludisme sur le continent.
Le défi ne réside pas seulement dans la technologie ; il est aussi structurel : manque d’infrastructures médicales, faible densité de laboratoires, insuffisance de personnel de santé, coût élevé des tests, délais incompatibles avec l’urgence clinique, isolement géographique de milliers de villages. Résultat : des milliers de patients meurent par manque d’un diagnostic, alors même que le traitement existe.
Inspirée dès l’enfance par l’univers numérique et les jeux vidéo qu’elle adorait, Rokhaya Diagne a très tôt compris le pouvoir transformateur de la technologie. Là où certains voyaient une simple distraction, elle y a vu un langage : celui de l’algorithme, du code, de l’interaction entre l’humain et la machine. De cette passion est née Afyasense, une solution technologique qui repose sur un algorithme d’intelligence artificielle capable d’analyser en quelques secondes des images prélevées sur une goutte de sang. Une innovation pensée pour : accélérer le diagnostic, réduire les erreurs humaines, éviter les coûts d’équipements complexes, rendre le test accessible aux zones rurales. Son objectif est simple et immense : éradiquer le paludisme en rendant le diagnostic plus rapide que la progression de la maladie.
L’originalité de la solution : un diagnostic précis, mobile et accessible
Afyasense se distingue par son originalité : une solution de diagnostic du paludisme à la fois précise, mobile et accessible, pensée spécialement pour les réalités rurales africaines. L’outil repose sur une technologie légère, facilement transportable dans les villages les plus isolés, éliminant ainsi la dépendance aux laboratoires classiques. Son algorithme d’intelligence artificielle, entraîné pour reconnaître les parasites du paludisme, analyse une image microscopique en quelques secondes avec une précision remarquable. En supprimant la nécessité de réactifs coûteux et d’équipements complexes, Afyasense réduit considérablement les coûts pour les structures locales. Plus qu’une innovation technologique, c’est une réponse conçue pour les personnes qui, loin des grandes villes, n’ont souvent que quelques minutes pour obtenir un diagnostic pouvant leur sauver la vie. Rokhaya Diagne n’a pas développé une technologie pour les laboratoires urbains : elle a créé un outil pour ceux qui n’ont rien et pour qui un diagnostic rapide peut signifier la survie.
Pour développer Afyasense, elle a adopté une démarche méthodique : collecte de données médicales en collaboration avec des professionnels de santé ; entraînement de modèles d’IA capables de repérer les parasites du paludisme ; tests sur le terrain pour adapter l’outil aux réalités des zones rurales ; co-construction avec les agents de santé communautaires ; simplification de l’interface pour permettre une utilisation intuitive. Cette approche centrée sur l’utilisateur rend Afyasense fiable, pratique et appropriable par les communautés locales.
Impact réel : une solution qui peut changer la trajectoire du paludisme
Afyasense n’est pas une simple innovation : c’est une réponse décisive qui peut réellement changer la trajectoire du paludisme en Afrique. En offrant un accès accru au diagnostic, la solution permet désormais aux villages les plus isolés de bénéficier d’un test rapide et fiable. Cette capacité à détecter la maladie en quelques secondes se traduit directement par une réduction des décès, car un diagnostic précoce ouvre immédiatement la voie au traitement. L’impact se ressent aussi au niveau des infrastructures : l’outil allège la pression sur les hôpitaux grâce à un triage plus efficace, tout en renforçant la surveillance épidémiologique grâce à la collecte de données en temps réel, permettant d’anticiper les zones à risque. Enfin, Afyasense favorise l’autonomisation des communautés en donnant aux agents de santé un outil simple, mobile et puissant, qui renforce leur capacité d’action au quotidien.
À seulement 27 ans, Rokhaya Diagne incarne une nouvelle génération de scientifiques et d’entrepreneurs africains : audacieux, visionnaires, profondément enracinés dans les réalités locales et convaincus que la technologie doit servir la vie. Avec Afyasense, elle ne crée pas seulement un outil : elle offre une chance supplémentaire de survie à des millions de personnes.
